Voici un bel exemple de superposition de vêtements — autrement appelé layering. Pour une tenue qui, à mon sens, présente une expression particulière de la féminité. Avant d'aborder cet aspect — le « message »—commençons par analyser la constitution de l'ensemble.
Côté couleurs, on peut avoir l'impression qu'elles sont nombreuses. Elles sont surtout variées, et, en fait, proches les unes des autres sur le cercle chromatique : un morceau d'arc-en-ciel (violet-rouge/rose-orange). D'où une impression de douceur alors qu'on est aussi dans la flamboyance. Un mélange de chaud (orange, rouge vermillon) et de froid (rose lavatère et aubergine). Le tout totalement approprié à la carnation de la femme en question.
Questions formes : l'allure générale de la silhouette est structurée à la fois par le triangle et par la spirale. Le triangle puisque la tenue est constituée de vêtements de coupes en trapèze. Le triangle également dans les divers éléments décoratifs : la bordure du col et des manches du manteau, le bas du jupon, les pompons de la ceinture, le coup de pied des chaussures. Par ailleurs, la spirale, par le mouvement général de la silhouette : les différentes épaisseurs tournent de l'axe de la femme. Spirale que l'on retrouve figurée en deux dimensions sur la poche du manteau.
Passons à présent à l'aspect expressivité : quel est le sens d'une telle tenue ? Pour commencer, on est ici très loin des canons de la féminité souvent fantasmée. Certain·e·s diraient : « on ne la voit pas », « elle se cache », « il faudrait qu'on voie ses formes ». Effectivement, ici, rien n'est marqué. La ceinture ne sert pas à souligner une taille de guêpe. Cette ceinture, plutôt, serait comme l'obi d'un kimono ; pas dans son aspect fonctionnel (l'obi sert à maintenir les différents éléments du kimono) mais dans son usage décoratif, une belle pièce pour elle-même.
Si cette tenue pourrait être rapprochée du principe du kimono — en beaucoup plus facile à mettre et à porter — l'inspiration s'arrête là, car on est dans une toute autre conception de la femme. Je ne crois pas que la personne qui figure ici cherche à entretenir un quelconque mystère… Dans le cas présent, c'est le plaisir que l'on ressent à jouer avec une multitude de pièces toutes plus jolies les unes que les autres : « Je n'ai pas envie de choisir, alors je les porte toutes à la fois ! », dans un esprit décomplexé et enfantin. Mais pas n'importe comment : la fantaisie n'exclut nullement la recherche sophistiquée. La féminité est bel et bien là : par la combinaison de couleurs très connotées et la fluidité des matières. Une féminité joyeuse et solaire.